Premier avril, Nathys Evans pousse son premier cri dans un petit hôpital de New York pour signaler au monde entier, mais surtout aux tympans de la sage femme, qu'il vient de débarquer sur Terre et qu'il a bien l'intention d'y rester. Assourdie, elle le pousse dans les bras de sa mère, lui sort ses plus sincères - ou pas - félicitations et souhaîte à la jeune maman beaucoup de bonheur avec son fils. Moïra Evans est émue, elle a du mal à contenir sa joie et regarde son frère, le seul homme dans la pièce, les yeux bordés de larmes. Il essaye de lui sourire, tant bien que mal mais la petite chose rose qu'elle tient dans ses bras, si fermement mais avec tant de douceur aussi, le dégoûte déjà.

Moïra : Nathan, je peux lui donner ton prénom..?
Nathan : Non. Ne me mêle pas à ça. Puis, c'est moche, Nathan.
Moïra : Non, c'est très beau, ne dis pas ça, je t'en supplie.
Nathan : Je préfère Mathys.
Moïra : Mathys, ça existe ça?
Nathan : J'ai dit pareil quand nos parents ont voulu t'appeler Moïra...
Moïra : Pourquoi pas Nathys, plutôt?
Nathan : Fais ce que tu veux, c'est ton gamin après tout...

Moïra le savait, ça voulait dire oui. Son frère n'avait jamais été très bavard et devenait rapidement désagréable mais après tout, elle le connaissait depuis qu'elle était née. Elle avait reçu le mode d'emploi depuis tout ce temps et elle le connaissait par coeur. Nathan l'avait acceuillie chez lui à la mort de leurs parents, dans un accident de voiture, il y a deux ans d'ici. Il l'avait toujours aidée et presque éduquée, comme si elle avait été sa fille. Aujourd'hui, Moïra a 17 ans et elle le déçoit encore, comme d'habitude. Il lui en veut, beaucoup. Cette connerie n'est pas comparable à toutes les autres qu'elle a pu faire mais celle-ci, il va falloir vivre avec.

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Lorsque Nathys fêta ses douze ans, il reçu une superbe guitare électrique rouge de son oncle avec le nom Jackson gravé sur le manche. Il n'avait pas encore la maturité pour apprécier les bonnes choses mais il était déjà capable d'admirer l'instrument comme on s'extasierait devant une oeuvre d'art. Il chantait depuis qu'il avait six ans, sa mère l'ayant initié assez tôt à la musique, et son rêve était de devenir chanteur, par conséquent. Moïra avait toujours cru en lui et en son talent, bien que son oncle aurait préféré qu'il fasse quelque chose de plus concret comme des études de médecine mais l'anatomie avait toujours eut l'effet d'un Valium sur Nathys et les viscères le faisaient royalement chié. Mais ça, Nathan était incapable de le comprendre, il n'en n'avait pas envie non plus.

Nathan : S'il faisait des études de médecine, il gagnerait bien sa vie ! Il n'a aucune chance en tant que musicien !
Moïra : Il a du talent !
Nathan : Le talent, ça apporte des rêves, pas l'argent pour pouvoir bouffer tous les soirs !
Moïra : Et s'il réalise son rêve tout en gagnant sa vie?
Nathan : C'est toi qui devrait arrêter de rêver, ma pauvre...

Nathys ne l'avait jamais vu aussi en colère. Son visage était devenu écarlate et la veine qui battait toujours à sa tempe lorsqu'il était énervé semblait vouloir éclater d'un moment à un autre. Nathan avait quitté la cuisine en enfilant son manteau, Moïra accrochée à sa jambe, le suppliant de rester, pour finir par sortir en claquant la porte. La jeune femme s'était éffondrée et était restée couchée à terre de longues minutes avant de se relever pour lancer un tendre sourire hypocrite à son fils. Elle avait passer sa main dans la tignasse noire de l'adolescent et lui avait murmuré à l'oreille qu'il deviendrait une grande star. Ouai, sûrement...

***

Nathys venait d'avoir 17 ans et avait tout de même accepté de poursuivre ses études au cas où il se révelerait être un gros naze en musique. Il avait malgré tout réussi à intégrer un groupe de Rock, les Black Blood et passait la plupart de ses soirées à répeter dans un garage avec ses amis. Il rentrait souvent tard le soir mais sa mère l'attendait toujours, à moitié endormie sur le sofa, le visage crispé par l'inquiétude. Pourtant, ce soir-là, c'est Nathan qui l'attendait dans le salon, assis sagement sur une chaise, impassible. Cela faisait deux ans qu'il ne l'avait plus vu alors forcément, son étonnement fut sans surprise.

Nathys : Nathan? Qu'est ce que tu fais ici?
Nathan : J'ai une mauvaise nouvelle...
Nathys : Quoi?
Nathan : C'est à propos de ta mère.
Nathys : Quoi? Ma mère? Où est-elle?
Nathan : Elle est décédée, Nathys.

Nathan leva vers le jeune homme des yeux bordés de fatigue, et de tristesse. Il lui tendit un article découpé dans le journal quotidien et se mit à scruter le sol, comme s'il avait été incapable de regarder son neveu en face. Nathys, le ventre crispé et le visage décomposé, parcourut le texte tant bien que mal, les larmes ruisselant déjà sur ses joues, les lui brûlant et lui brouillant la vue par la même occasion. Il ne retint que ces phrases: Moïra Evans, mère célibataire, fut retrouvée vidée de son sang dans une ruelle abandonnée de New York. Les policiers ont pu constater la marque de deux canines dans la gorge de la jeune femme ce qui relance les rumeurs sur les fameux vampires qui semblent hanter la ville de New York chaque nuit depuis la malédiction. Quand ces meurtres cesseront-ils enfin?

Nathan : Elle voulait te protéger...
Nathys : Me protéger de quoi?
Nathan : De ça... Elle t'a menti. Ton père ne vous a pas abandonné. Il a été tué lui aussi, comme ta mère. Elle voulait te tenir loin de ces histoires.
Nathys : Pourquoi l'ont-ils tué? Pourquoi elle? Elle n'avait rien fait!
Nathan : Je te l'ai dit, Nathys. Vivre ici n'est pas un rêve, mais un cauchemar...